Un fonctionnaire qui chute alors qu'il rejoint son véhicule garé dans sa propriété bénéficie-t-il de la protection attachée aux accidents de trajet ?
Ce n’est pas l’avis du Conseil d’État qui estime que pour que cela soit le cas, encore eut-il fallu que le trajet ait effectivement commencé (arrêt du Conseil d’État, 30 novembre 2018, n° 416753).
Il s’agissait en l’espèce de la situation d’une agente domiciliée dans le Lot mais affectée temporairement à Marseille pour une mission où elle entendait rejoindre, la veille de sa prise de service, le logement provisoire mis à sa disposition par son administration : voulant, au moment de son départ, accéder à sa voiture parquée devant son domicile, elle a chuté et s’est blessée.
Dans un premier temps, considérant qu’il ne s’agissait pas d’un accident de service, son administration lui a refusé le bénéfice d’une allocation temporaire d’invalidité, de même que le tribunal administratif.
Dans un deuxième temps, le juge d’appel conclut dans le même sens au motif que la qualification d’accident de trajet ne peut être retenue dans la mesure où il est survenu à l’occasion du trajet tendant à rejoindre son logement marseillais et non directement le lieu d’exercice de ses fonctions.
Dans un troisième temps enfin, le Conseil d’Etat va dans le même sens, mais pour des raisons distinctes en rappelant :
- d’une part que constitue un accident de trajet « tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s’accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l’effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l’accident du service » ;
- d’autre part - et surtout - qu’est « également réputé constituer un accident de trajet, dans les mêmes conditions, tout accident se produisant sur le parcours habituel entre la résidence de l’agent et le lieu où il est hébergé provisoirement afin d’être à même d’exercer les fonctions qui lui sont attribuées ».
En cela, et même si la conclusion est la même, le conseil d’Etat estime d’abord que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en prenant en compte, pour écarter la qualification d’accident de trajet, uniquement « la … circonstance que son accident était survenu à l’occasion d’un trajet ayant pour destination son logement à Marseille et non directement les locaux professionnels où elle devait exercer ses fonctions », et alors même que l’intéressée « regagnait un logement où elle était hébergée provisoirement afin d’être à même d’assurer la mission temporaire qui lui avait été confiée ».
Mais c’est surtout l’argument suivant qui doit retenir l’attention : en effet, la haute juridiction indique que « pour que soit reconnue l’existence d’un accident de trajet, il faut que le trajet du domicile au lieu de destination ait commencé », ce qui n’est « pas le cas lorsque l’intéressé se trouve encore, lors de l’accident, à l’intérieur de son domicile ou de sa propriété ».
Ici, le Conseil a estimé que la chute était intervenue au sein de la propriété de l’agente ce qui faisait obstacle à ce que la présomption d’imputabilité au service de l’accident soit établie, excluant alors le bénéfice de l’allocation temporaire d’invalidité sollicité, son refus étant dès lors justifié.