Droit applicable à la prévention dans la fonction publique territoriale
Synthèse :
Si le statut général de la Fonction publique comporte un renvoi aux dispositions du Code du travail pour ce qui concerne les principes généraux et la démarche de prévention ainsi pour ce qui concerne la prévention des risques particuliers, la Fonction publique territoriale fait l’objet de dispositions spécifiques concernant les Comités techniques et Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la médecine préventive, les agents de prévention, la formation en matière de sécurité et de santé au travail ainsi que les droits de retrait et d’alerte.
Textes :
Directive cadre du 12 juin 1989 visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs
Code Général de la Fonction Publique
Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
Décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la FPT
SOMMAIRE
Dispositif législatif et réglementaire applicable à la Fonction publique territoriale
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Eléments communs à l’ensemble de la Fonction publique
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Principes généraux, démarche de prévention, risques particuliers
Eléments spécifiques à la Fonction publique territoriale
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Comités techniques et Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail
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Service de médecine préventive
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Agents de prévention
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Registre santé et sécurité au travail
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Formation en matière de santé et de sécurité au travail
-
Droit de retrait et droit d'alerte
Dispositif législatif et réglementaire applicable à la Fonction publique territoriale
Le Code général de la fonction publique pose, en son article L. 136-1, le principe du droit des agents à des conditions de travail de nature à protéger leur santé et leur sécurité.
Dans le domaine de la santé et de la sécurité des agents en service, il organise un système qui :
- renvoie, avec son article L. 811-1 et L.811-2 au Code du travail pour l'application des principes de prévention, de la démarche d'évaluation des risques professionnels et des règles particulières de sécurité :
- Les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité dans les services, collectivités et établissements [...] sont celles définies par les livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail ainsi que par l'article L. 717-9 du code rural et de la pêche maritime. Il peut toutefois y être dérogé par décret.
- définit de manière spécifique les acteurs de la prévention et leurs missions : autorités territoriales, agents, agents chargés de la prévention, agents chargés d'une fonction d'inspection, Comité technique, Comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail, Service de médecine préventive.
L’organisation, les attributions et les moyens des différents acteurs représentatifs et fonctionnels de la prévention dans les collectivités et leurs établissements sont précisés par le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la Fonction publique territoriale.
Eléments communs à l’ensemble de la Fonction publique
Principes généraux, démarche de prévention, risques particuliers
Dans les services des collectivités et leurs établissements administratifs rattachés, les règles applicables en matière de santé et de sécurité sont celles de la Partie IV, Livres I à V, du Code du travail sur la santé et la sécurité au travail (Code général de la fonction publique, art. L. 811-1 - Décret n°85-603 du 10 juin 1985, art. 3).
Cela vise essentiellement les principes de prévention, la démarche d'évaluation des risques ainsi que les réglementations particulières des risques professionnels (risque chimique, chantiers, bruit…).
Eléments spécifiques à la Fonction publique territoriale
Comités techniques et Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail
Comités techniques (CT)
Les Comités techniques ont une compétence consultative en matière d'hygiène et de sécurité.
Comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT)
Le Comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dispose d’une compétence et de pouvoir étendus collectivité ou l'établissement.
Changements 2022/2023 à noter : les comités techniques (CT) et les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sont réorganisés et fusionnés en une instance unique : le comité social territorial (CST) qui doit être mis en place au plus tard le 1er janvier 2023.
Dans les administrations territoriales de plus de 200 agents, il est également prévu la création, au sein des comités sociaux, d'une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (FSSCT). En dessous de ces seuils, si des risques professionnels le justifient, une formation spécialisée pourra être également instituée.
Les comités sociaux doivent être mis en place en 2022 à l'issue des prochaines élections professionnelles et au plus tard le 1er janvier 2023. Des fiches pratiques seront prochainement disponibles sur ces nouvelles instances.
Service de médecine préventive
Création et missions
Le principe en est prévu par la loi (Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art.108-2) :
Les services des collectivités et des établissements mentionnés à l'article 2 doivent disposer d'un service de médecine préventive, soit en créant leur propre service, soit en adhérant aux services de prévention et de santé au travail interentreprises ou assimilés, à un service commun à plusieurs employeurs publics ou au service créé par le centre de gestion. Les dépenses résultant de l'application du présent alinéa sont à la charge des employeurs publics intéressés. Le service est consulté par l'employeur public sur les mesures de nature à améliorer l'hygiène générale des locaux, la prévention des accidents et des maladies professionnelles et l'éducation sanitaire.
Le service de médecine préventive a pour mission d'éviter toute altération de l'état de santé des agents du fait de leur travail, notamment en surveillant les conditions d'hygiène du travail, les risques de contagion et l'état de santé des agents. A cet effet, les agents font l'objet d'une surveillance médicale et sont soumis à un examen médical au moment de l'embauche ainsi qu'à un examen médical périodique dont la fréquence est fixée par décret en Conseil d'Etat.
Pour plus de détail sur les missions et l'organisation du service, voir notre fiche Service de médecine préventive.
Surveillance médicale
La surveillance médicale des agents relève des compétences des Services de médecine de prévention
Le médecin de prévention assure la surveillance médicale des agents par des examens médicaux. Celle-ci comprend :
- un examen médical périodique (au minimum tous les 2 ans,) avec possibilité pour l'agent de demander un examen supplémentaire durant cette période (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 20) ;
- Une surveillance médicale particulière et obligatoire pour certaines catégories d'agents soumis à des risques particuliers, exercée en sus des examens périodiques ; la nature des examens, dont les examens complémentaires si nécessaire, et leur fréquence sont déterminées par le médecin de prévention. Les agents concernés sont les suivants :
- des personnes en situation de handicap,
- des femmes enceintes, venant d'accoucher ou allaitantes,
- des agents réintégrés après un congé de longue maladie ou de longue durée,
- des agents occupant des postes dans des services comportant des risques spéciaux,
- des agents souffrant de pathologies particulières (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 21 et 22).
Un dossier médical en santé au travail, constitué par le médecin du travail ou, le cas échéant, un des professionnels de santé mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 4624-1. Il retrace dans le respect du secret médical les informations relatives à l'état de santé du travailleur, aux expositions auxquelles il a été soumis ainsi que les avis et propositions du médecin du travail (article L 4624-8 du Code du travail ).
Le modèle du dossier médical, la durée et les conditions de sa conservation sont fixés par l'arrêté mentionné à l'article 28-2 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 26.1).
Action sur le milieu de travail du médecin de prévention
Voir fiche pratique "service de médecine préventive".
Agents de prévention
L’employeur public doit prévoir, conformément aux dispositions de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, de désigner des agents, en interne à l’administration, pour assurer des fonctions de conseil dans la mise en oeuvre des règles d’hygiène et de sécurité.
Assistants et conseillers de prévention
Des assistants de prévention et, le cas échéant, des conseillers de prévention sont désignés par l'autorité territoriale sous l'autorité de laquelle ils exercent leurs fonctions. Les assistants de prévention constituent le niveau de proximité du réseau des agents de prévention. Les conseillers de prévention assurent une mission de coordination. Ils sont institués lorsque l'importance des risques professionnels ou des effectifs le justifie (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 4).
Leur mission est d'assister et de conseiller l'autorité territoriale auprès de laquelle ils sont placés, dans la démarche d'évaluation des risques et dans la mise en place d'une politique de prévention des risques ainsi que dans la mise en œuvre des règles de sécurité et d'hygiène au travail (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 4.1).
Fonction d’inspection dans le domaine de la santé et de la sécurité
Le ou les agents chargés d'assurer une fonction d'inspection dans le domaine de la santé et de la sécurité (ACFI) sont désignés par l'autorité territoriale après avis du CHSCT. Leur fonction ne peut être cumulée avec celle d’assistant ou de conseiller de prévention.
Les ACFI contrôlent les conditions d'application des règles d'hygiène et de sécurité et proposent à l'autorité territoriale compétente toute mesure qui leur paraît de nature à améliorer l'hygiène et la sécurité du travail et la prévention des risques professionnels (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 5).
Registre santé et sécurité au travail
Un registre de santé et de sécurité au travail est ouvert dans chaque service dans les conditions suivantes (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 3.1) :
- il est mis à la disposition de l'ensemble des agents et, le cas échéant, des usagers,
- il contient les observations et suggestions des agents relatives à la prévention des risques professionnels et a l'amélioration des conditions de travail,
- il est tenu par les assistants et conseillers de prévention,
- il est communiqué à leur demande aux Agents chargés d'une fonction d'inspection (ACFI) et au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ou, à défaut, du Comité technique (CT).
Formation en matière de santé et de sécurité au travail
Formation à destination de tous les agents
Le décret du 10 juin 1985 généralise la formation en matière de santé et de sécurité de tous les personnels. Il prévoit une formation pratique et appropriée à la sécurité de tous les agents, dispensée sur les lieux et le temps de travail, suite à (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 6) :
- Lors de l'entrée en fonctions des agents,
- Lorsque par suite d'un changement de fonctions, de techniques, de matériel ou d'une transformation des locaux, les agents se trouvent exposés à des risques nouveaux,
- En cas d'accident de service grave ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ayant entraîné mort d'homme, ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente, ou ayant révélé l'existence d'un danger grave, même si les conséquences ont pu en être évitées,
- En cas d'accident de service ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel présentant un caractère répété à un même poste de travail, ou à des postes de travail similaires, ou dans une même fonction, ou des fonctions similaires
- A la demande du service de médecine préventive, au profit des agents qui reprennent leur activité après un arrêt de travail consécutif à un accident de service ou à une maladie professionnelle.
Cette formation a objet d'instruire l'agent des précautions à prendre pour assurer sa propre sécurité, celle de ses collègues de travail et, le cas échéant, celle des usagers du service. Elle porte en particulier sur (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 7) :
- les circulations sur les lieux de travail, les issues et dégagements de secours ;
- les conditions d'exécution de travail et le fonctionnement des dispositifs de protection et de secours ;
- les dispositions en cas d'accident ou de sinistre ;
- les responsabilités encourues.
Formations spécifiques des agents impliqués dans la prévention
Les représentants du personnel dans les organismes compétents en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail régis par le titre IV bénéficient d'une formation d'une durée minimale de cinq jours au cours du premier semestre de leur mandat. Cette formation est renouvelée à chaque mandat. Elle est organisée dans les conditions définies par le décret n° 2007-1845 du 26 décembre 2007 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de la fonction publique territoriale (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 8).
Cette formation doit leur permettre de développer leur aptitude à déceler, à mesurer et à analyser les risques professionnels et de les initier aux méthodes et procédés de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail.
- Une formation de prise de poste et une formation continue sont prévues pour les conseillers et assistants de prévention (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 4.2) et les agents chargés d'une fonction d'inspection ou ACFI (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 5).
- Une formation de secouriste du travail : dans chaque service où sont effectués des travaux dangereux, un ou plusieurs agents doivent avoir reçu obligatoirement la formation nécessaire pour donner les premiers secours en cas d'urgence (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 6).
Droit de retrait et droit d'alerte
Le droit de retrait des agents
Tout agent qui a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ou qui constate une défectuosité dans les systèmes de protection (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 5.1) :
- doit alerter immédiatement son supérieur hiérarchique (obligation professionnelle d'alerte pour tout agent concerné) ;
- a droit de se retirer de cette situation de travail jusqu'au rétablissement de la situation normale :
- sans encourir ni sanction, ni retenue de rémunération ;
- à la condition de ne pas créer pour autrui un nouveau danger.
L'autorité territoriale prend les mesures et donne les instructions nécessaires pour permettre aux agents, en cas de danger grave et imminent, d'arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement leur lieu de travail.
L'autorité territoriale ne peut demander à l'agent qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection.
Les missions opérationnelles de sécurité des personnes et des biens incompatibles avec l'exercice du droit de retrait dans le cadre de la police municipale et de la sécurité civile sont définies par arrêté ministériel après avis du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (Arrêté du 15 mars 2001).
Le droit d'alerte du CHSCT
Tout membre du CHSCT qui constate un danger grave et imminent révélé ou non par un agent qui a exercé son droit de retrait, déclenche la procédure selon les étapes suivantes (Décret n° 85-603 du 10 juin 1985, art. 5.2) :
- avertissement de la hiérarchie ;
- consignation sur un registre spécial desdits dangers graves et imminents ;
- puis enquête immédiate et conjointe menée par l'autorité territoriale ou son représentant et par le membre du comité qui a effectué le signalement ;
- mise en œuvre, par l’autorité territoriale, des mesures nécessaires pour remédier à la situation et information du CHSCT des décisions prises ;
- en cas de divergence sur la façon d'évaluer et de traiter le risque, réunion en urgence du CHSCT dans les 24 heures avec convocation de l'ACFI et, si nécessaire, de l'inspecteur du travail ;
- enfin, en cas de désaccord persistant, demande, par l’autorité territoriale ou la moitié des membres titulaires du personnel, d'intervention de l'inspecteur du travail.